jeudi 13 février 2014

L'importance de la macroéconomie en finances publiques (Partie III) : L'élasticité

Suite de Partie I et Partie II

L'élasticité du déficit public au PIB est une question un peu plus simple que les deux premières. Dans tous les pays, les recettes fiscales varient avec les revenus (très peu d'imposition forfaitaire) et certaines dépenses publiques augmentent lorsque l'économie est en récession, principalement les dépenses de chômage. 

Prenons le cas simple d'un pays à taux de taxation unique, t, tel que le montant total des impôts prélevés est égal à t fois les revenus de tous les agents : T = t * PIB. Supposons que les dépenses de ce pays sont constantes D, qu'il n'y a pas d'assurance chômage. 

Le solde budgétaire est donc S = T - D et en pourcentage de PIB cela donne 
s = t  -  D/PIB
Si les dépenses représentent 30% du PIB potentiel,  on a donc
s = t  -  0.3*PIB pot/PIB = t  -  0.3 * 1/ (1+OG) ~  t  -  0.3 * (1  -   OG)
Où OG est l'Output Gap défini en partie I par OG  = (PIB - PIB pot) / PIB pot est négatif

Une diminution de 1 point de l'output gap (donc une diminution de la croissance de 1 point) conduit ici à une diminution de 0.3 point du solde budgétaire. Ici, l'élasticité du déficit public au PIB est donc de - 0.3. 

En réalité, les taux de taxation ne sont pas uniques et les dépenses publiques réagissent au PIB. Les recettes d'impôt progressif augmenteront plus vite que le PIB, et les dépenses d'assurance chômage augmenteront lorsque le PIB baisse. 

Estimer cette élasticité est utile lorsque le gouvernement fait ses prévisions pour le Projet de Loi de Finance à l'automne de l'année précédente. Au-delà des articles racoleurs et catastrophistes de la presse, pour qui la Cour des Comptes ne fait que "pointer les erreurs",  "épingler", voire "fustiger" le gouvernement (quel que soit le gouvernement, c'est une constante), la polémique actuelle sur le rapport de la Cour des Comptes (lien) porte notamment sur le fait que l'élasticité des recettes s'est révélée beaucoup plus faible que prévue dans le PLF il y a un an : 0.4, au lieu des 1 prévus. Cette élasticité exceptionnellement faible pose d'ailleurs problème, une élasticité des recettes de 1 (les recettes augmentent de 1% quand les revenus augmentent de 1%) étant en général une hypothèse assez faible, la progressivité de certains impôts devant conduire à une élasticité supérieure à 1. Pour la France, c'est un peu compliqué, car les impôts de l'année N portent parfois sur les revenus de l'année N-1, modulo différents acomptes, ce qui rend le calcul de l'élasticité très difficile lorsque l'économie change de régime de croissance. 

En résumé, le tableau ci-dessous donne les élasticités des recettes et dépenses (en % de PIB) pour les Etats de l'Union Européenne. En général, cela tourne autour de 0.5. 
Source : Commission Européenne

Les mécanismes conduisant le déficit budgétaire à augmenter naturellement quand la croissance ralentit sont appelés les stabilisateurs automatiques. En effet, le déficit augmentant contribue à adoucir le ralentissement de la croissance, proportionnellement au multiplicateur. C'est le principe d'une politique contra-cyclique, augmenter le déficit en période de récession et le réduire dans les booms. 

Enfin, ces élasticités nous permettent de définir le déficit conjoncturel (l'augmentation du déficit due à l'output gap) égal à Output Gap multiplié par l'élasticité, et le déficit structurel, qui est le déficit n'étant pas expliqué par les fluctuations conjoncturelles, donc déficit total moins déficit conjoncturel. 




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